PORPHYRE


Porphyre

(234 - 305)
Philosophe grec


Porphyre prêche l'abstinence de la viande comme condition de pureté pour un rapprochement à Dieu, pour une assimilation à cet Un auquel seulement une pratique de vie très pure et ascétique pouvait conduire. Le respect de l'animal est surtout le respect de son âme, similaire à la nôtre.
(l'âme des bêtes dans la pensée occidentale depuis l'Antiquité jusqu'au siècle des Lumières - Erminio Caprotti)

"C'est comme si les corbeaux prétendaient qu'il n'y a pas d'autre langage que le leur et nous disaient dénués de raison parce que notre parler est pour eux vide de sens;ou si les habitants de l'Attique réservaient au seul attique le nom de langage et regardaient les autres hommes comme dénués de raison parce qu'il ne participent pas à la langue attique. Un habitant de l'Attique pourtant arriverait plus vite à comprendre un corbeau qu'à comprendre un Syrien ou un Perse parlant le syrien ou le perse. Mais n'est-il pas absurde de déterminer qu'un être est doué de raison ou ne l'est pas selon que son parler est intelligible ou non, qu'il reste muet ou qu'il a un langage ? On refuserait ainsi la raison au dieu qui est au-dessus de tout et aux autres dieux parce qu'ils sont muets. Mais les dieux révèlent leur pensée tout en restant muets et les oiseaux sont plus prompts que nous à la saisir."

La purification qui fait parvenir au "soi essentiel, à la personne essentielle qui s'identifie à l'intellect", doit en passer non seulement par des discours, des raisonnements, un processus de connaissance, voire un accès à la contemplation, mais encore par des actes. On ne saurait se détacher des sensations et de l'irrationalité, de l'alogia qu'elles provoquent chez celui qui continue à manger de la viande. Certes, alors même qu'il conviendrait, "si c'était possible, de s'abstenir de toute nourriture" pour ne pas "épaissir le lien" qui nous attache au sensible, il faut "accorder à la nature un peu de nourriture, car c'est là une nécessité du monde de la génération." Mais pourquoi tant d'hommes passent-ils la mesure ? " Si l'on a peur de l'abstinence des êtres animés et si l'on se livre par plaisir à la nourriture carnée, n'est ce point par crainte de la mort (...) et à cause de l'insatiable appétit de vivre ? " Comme on s'éloigne alors de l'idéal philosophique d'un "homme qui s'exerce à mourir" ! En vérité, "pas un médecin, pas un philosophe, pas un gymnaste ne peut critiquer l'abstinence".

(Porphyre - Traité de l'abstinence in Le Silence des bêtes - Elysabeth de Fontenay)